Histoire

Carte de Thines

THINES (altitude 550 m), village perché sur un promontoire rocheux au bas duquel coule la Thine.

Les maisons, de schiste brun et couvertes de lauzes, font corps avec le sol d’où l’on tire la pierre.

Des bandes de terre, « les accols » aménagés péniblement à la main et à dos d’homme, s’étagent sur les pentes abruptes et permettent quelques cultures.

Le climat est contrasté, froid l’hiver, chaud et sec l’été, pluvieux et orageux en automne. Il arrive que le village soit bloqué par la neige ou que des trombes d’eau gonflent les torrents.

Néanmoins, au-dessus des gelées hivernales de la vallée et protégé des vents du nord par les hauteurs d’alentour, THINES est un site humain par excellence.

Au Moyen-âge, les moines bénédictins surent le découvrir pour y bâtir « un univers de paix et d’esprit ».

Le paysage est austère : nulle habitation alentour !

Et pourtant les nombreux hameaux que compte la commune sont tout proches, cachés dans les replis de la montagne !!!

L’église à été construite sur l’emplacement d’une ancienne chapelle, elle-même certainement établie sur un sanctuaire celte. La « porte du château, ouverte dans le mur nord de l’édifice, conduisait, le long de falaises abruptes, jusqu’au château dont n’a subsisté que la tour, démolie en 1808.

En cheminant dans les ruelles ou calades du village, on peut remarquer le réemploi de nombreuses pierres, encadrements de fenêtres ou portes qui décorent les plus anciennes constructions.

Église Notre-Dame-de-Thines

Eglise romane du XIIe siècle, classée Monument Historique en 1848 par Prospère Mérimée.

Proche des grandes voies de pèlerinage du Puy et de Saint-Jacques-de-Compostelle, elle fut construite par les moines de l’abbaye du Monastier-Saint-Chaffre dont elle dépendait.

En pierres de taille de granit gris sur un soubassement de schiste, son architecture sobre (nef à deux travées, chœur et abside) contraste avec la richesse d’une décoration exceptionnelle : pilastres, colonnes engagées, bandes lombardes, losanges, dents d’engrenage, sculptures réalistes et naïves inspirées de la vie locale, modillons et chapiteaux, expression de l’iconographie religieuse du Moyen-âge. Riche bichromie de grès rouges et beiges particulièrement épanouie au niveau de l’abside (ouvertures, colonnes et arcatures) et du chœur.

Un escalier monumental conduit au porche latéral qui domine la vallée de la Thine. Triples voûtes où la bichromie met en valeur les sculptures calcaires finement ciselées de Saint-Pierre et Saint-Jacques à l’ouest, Saint-Jean et le Christ à l’est. La frise du linteau narrant l’entrée à Jérusalem, la Cène et l’arrestation de Jésus provient également des ateliers languedociens.

C’est un des trésors de l’Art roman méditerranéen avec sa décoration bichromique de grès rouges et gris.

« Notre Dame de Thines occupe une place importante dans la riche floraison des églises romanes du midi méditerranéen ».
« L’église de Thines, malgré ses proportions restreintes, est des plus remarquables ».
« Elle offre en outre le mélange très curieux de l’architecture de l’Auvergne avec celle de la Provence ».
« C’est un de ces types rares, si intéressants pour l’histoire de l’architecture dans notre pays, qu’il importe de conserver avec soin ».

Prospère Mérimée, rapport en date du 18 janvier 1850
Cf. Pierre-Marie Auzas : « Thines en Vivarais », 1977, p.12

Habitat : village de Thines

L’habitat, à Thines et dans la vallée, est typiquement issu de l’habitat paysan du Moyen-Age. Les « maisons foghanes » étaient de petites maisons d’une seule pièce, cuisine et chambre, au sol probablement en terre battue ou en pierre et couvertes de chaume ou de genêt.

Grâce au développement de la culture du châtaignier, à partir du XVIe siècle, l’utilisation de poutres et de planchers en bois de châtaignier a permis la construction de maisons plus grandes, en pierre avec toits de lauzes.

Elles comprenaient alors, autour d’une cour intérieure :

  • un lieu d’habitation avec une cheminée et un four à pain,
  • une citerne,
  • une bergerie pour animaux et fourrage,
  • un local pour le cochon et les volailles,
  • une clède pour sécher les châtaignes,
  • un petit jardin ou « courtil » pour les herbes et plantes médicinales, surtout la sauge et le millepertuis,
  • un rucher plus ou moins important près d’un point d’eau, ou quelques ruches près de la maison,
  • parfois un moulin « bladier et drapier » au bord de la rivière ou le long des ruisseaux
  • et souvent, une grange sur le plateau pour entreposer le foin, la charette et abriter le troupeau.

Le confort était très sommaire : l’eau était puisée dans la citerne et on allait chercher l’eau potable à la source, 300m en amont du village, ou au « puisadou », dans le ruisseau en contrebas.

Jusque dans les année 1948-1950, on s’éclairait au caleil à huile ou à la chandelle de suif ou de cire d’abeille, ensuite à la lampe à pétrole ou à acétylène. L’électricité n’est arrivée à Thines qu’en 1955 et 1958 dans les hameaux.

Le mobilier comprenait : un lit, un coffre pour le linge, les habits et les choses précieuses, une table, un vaisselier parfois et des ustensiles dans la cheminée.

Les Moulins

Moulin à seigle, à châtaignes ou à foulon

Dans la vallée de la Thine, on a recensé une vingtaine d’anciens moulins à seigle, à châtaignes, ou à foulon pour le drap. Il en existait sûrement davantage.
L’eau était acheminée depuis la rivière jusqu’à une réserve d’eau : « la gourgue », par des « béalières » creusées dans le rocher ou par des canalisations ouvertes, en tronc de châtaignier. La vanne de la « gourgue » était ensuite ouverte, l’eau entraînant les pales qui faisaient tourner la meule, à l’étage supérieur du moulin.
Les meules de granit étaient amenées depuis la carrière de Lespinas par un sentier abrupte qui descendait du plateau… il fallait huit hommes attelés à deux barres pour maintenir la nouvelle meule qu’on roulait jusqu’à la vallée.

Le pont de la Dragonnière

Ce pont, jeté d’un rocher à l’autre, est le premier qui « enjambe » la Thine et permettait, dès 1870, de désenclaver le sud de la commune de Thines, de relier Malarce à Lafigère, puis au-delà, à Pied-de-Borne et Sainte-Marguerite.

Impressionnant par sa hauteur et le parfait « plein cintre » de son arche, il a su résister (contrairement aux trois autres en aval et en amont dont il ne subsiste que des ruines de piliers), aux nombreuses crues redoutées par tous les cévenols.

Les deux dernières en date, dans les années 1950 et 1970, étaient telles qu’elles ont emporté les parapets, ne lui laissant que sa voûte, extrêmement mince, en parfait état !

Ce pont étroit n’était pas conçu pour les carrioles. Il était emprunté uniquement par les piétons, les ânes, les mulets et les troupeaux, tout comme les sentiers qu’il desservait.

Le pont de Gournier

Le pont de Gournier


Juste sous le village de Thines, le pont de Gournier a été construit en pierres en 1828, « l’année que Jean Laurent du Clapier fut trouvé demi-mort de défaillance en transportant de la chaux pour le pont. Il fut amené à La Blacherette où il mourut. Il était âgé de 47 ans ».

Le premier pont était en bois. Il a brûlé alors qu’un jeune, qui voulait rejoindre sa belle à la lueur d’une lanterne, laissa par mégarde tomber du feu sur des feuilles sèches.

Le pont de Gournier était alors le seul accès possible pour se rendre au village de Thines à partir de Valbelle. La route ne fut construite qu’en 1900, d’abord jusqu’à Maurines, puis jusqu’à Gournier, jusqu’aux Moulins et enfin jusqu’à Thines, après la guerre, en 1924.

La passerelle des Moulins

Elle a été construite en 1863-1864 pendant les journées de « prestation ».

Les ruches de Thines

La ruche traditionnelle cévenole était aménagée dans un tronc de châtaignier creux, coupé par segments de 1m environ. Avec un croisillon intérieur à mi-hauteur, un couvercle de bois ajusté sur le haut et quelques trous à la base, elle était posée sur une pierre plate et recouverte d’une très grande lauze qui l’abritait et la protégeait du froid et des vents violents. Chacune des « fermes » de la vallée avait son petit rucher, plus ou moins proche, installé près d’un point d’eau dans un lieu abrité exposé plein sud.

Le plus grand rucher de la commune et même d’Ardèche se trouvait à Thines : le rucher Laurent, à 800 m en amont du village. Il comptait, à la fin du XVIIIe siècle, plus de 500 ruches-tronc que le « père Cyprien Laurent » exploitait encore dans les années 60.
Depuis, le nombre de ruches a considérablement diminué. Quelques ruches modernes à cadre ont remplacé les vieux troncs rapetassés avec de la ferraille rouillée.

Le Parc Naturel Régional des Monts d’Ardèche a signé une convention avec les propriétaires actuels pour la remise en état des lieux, de la miellerie et des ruches traditionnelles. L’éloignement du rucher rend le travail extrêmement pénible et retarde considérablement la réalisation de ce projet.

Monument à la résistance